M. le président. L’ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.
Nous commençons par une question du groupe SRC.
Mode de scrutin
pour l’élection des conseillers territoraux
M. le président. La parole est à M. Bruno Le Roux.
M. Bruno Le Roux. Monsieur le Premier ministre, après la sévère défaite de votre majorité (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe SRC), et avant que Jean-Marc Ayrault, notre président de groupe, ne vous interroge dans quelques minutes sur ses conséquences, je souhaite rappeler ici que vous avez toujours le projet de mettre en place un scrutin majoritaire uninominal à un seul tour, c’est-à-dire un scrutin injuste où celui qui arrive en tête au premier tour est élu sans la majorité des voix et ne peut donc avoir cette légitimité que donne une majorité d’électeurs, légitimité acquise par les présidents de région qui s’exprimeront après moi.
Depuis plusieurs mois, nous disons ici, avec d’autres, que ce mode d’élection porterait atteinte à l’égalité comme à la sincérité du suffrage des Français.
Regardons concrètement ce qui se serait passé si l’on avait appliqué votre projet aux élections régionales qui viennent de se tenir dans notre pays.
Dans neuf régions sur vingt-six, représentant plus de 19 millions d’électeurs inscrits, le choix majoritaire des électeurs au second tour n’aurait pas été respecté. Il s’agit d’un véritable déni de démocratie. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Dans huit régions, l’UMP, largement battue au second tour, aurait pourtant gagné en obtenant moins d’un tiers des voix au premier tour. Il s’agit là d’une aberration démocratique.
On voit donc bien que votre projet aurait entraîné un véritable scandale en donnant le pouvoir régional à des élus pourtant battus largement au second tour avec 20 % d’écart pour les uns ou encore plus de 400 000 voix en leur défaveur pour les autres.
En dehors des conséquences sur la réforme des collectivités territoriales que vous devez nécessairement tirer, allez-vous cesser aujourd’hui ces tripatouillages démocratiques ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
M. le président. La parole est à M. Alain Marleix, secrétaire d’État à l’intérieur et aux collectivités territoriales. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
M. Alain Marleix, secrétaire d’État à l’intérieur et aux collectivités territoriales. Comme vous le savez, monsieur le député, l’un des axes majeurs de la réforme des collectivités territoriales vise à mettre en place un élu commun au conseil régional et au conseil général, qui siégera dans les deux assemblées, pour donner de la cohérence aux moyens affectés par l’une et l’autre.
Nous avons voulu mener cette réforme des collectivités dans la transparence (Exclamations sur les bancs du groupe SRC), ce qui nous a conduits à déposer le même jour sur le bureau du Sénat le texte institutionnel et le projet de loi relatif à l’élection des conseillers territoriaux.
Vous êtes donc tout à fait éclairé sur le mode de scrutin qui est proposé pour l’élection des futurs conseillers territoriaux, dont le principe a déjà été voté par le Sénat il y a quelques semaines. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
C’est un scrutin majoritaire à un tour, ce qui permet l’ancrage territorial du futur conseiller territorial, ancrage qui, vous en conviendrez, fait actuellement défaut aux conseillers régionaux (« Non ! » sur les bancs du groupe SRC), avec une dose de proportionnelle permettant d’assurer la représentation des minorités et la parité.
Le texte relatif à l’élection des conseillers territoriaux sera examiné prochainement par le Sénat, probablement au mois de mai. Comme il l’a indiqué à plusieurs reprises, le Gouvernement, sera ouvert à toute amélioration du dispositif qu’il a proposé. C’est d’ailleurs tout le sens de la mise en place des différents groupes de travail qui, aujourd’hui, y réfléchissent.
Priorités du Gouvernement
M. le président. La parole est à M. Jean-François Copé, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
M. Jean-François Copé. Monsieur le Premier ministre, au lendemain de la sévère défaite qu’a connue notre majorité à l’occasion des élections régionales,…
Plusieurs députés du groupe SRC. Bravo !
M. Jean-François Copé. …nous devons, comme cela doit se faire en pareille circonstance, tirer rapidement les leçons des messages qui nous ont été adressés par les Français. C’est un rendez-vous d’humilité, de vérité mais aussi de détermination.
Notre mission est à présent d’identifier ce que doit être dans les prochaines semaines le nouveau pacte majoritaire, au service des Français, répondant aux attentes qu’ils ont exprimées ainsi qu’à leurs légitimes inquiétudes dans le contexte de crise économique que nous connaissons.
Cela concerne les réformes vitales pour notre pays : réforme des retraites, baisse des déficits et de la dette. Ce sont aussi des rendez-vous liés à la question de l’emploi, parce qu’un taux de 10 % de chômage est une cote d’alerte, que connaissent d’ailleurs tous les grands pays européens, et contre laquelle il faut nous mobiliser.
C’est enfin un rendez-vous sur les valeurs de la République : la sécurité, la laïcité, mais aussi les inquiétudes pour l’avenir exprimées, notamment, par la France rurale.
M. Henri Emmanuelli. Et l’égalité !
M. Jean-François Copé. Notre conviction est que, d’ici à deux ans, les Français attendent de notre majorité un bilan des actions que nous aurons conduites : en clair, des résultats.
Du côté de la gauche également, un rendez-vous est attendu par les Français, et il sera d’ailleurs intéressant d’en faire la confrontation.
Plusieurs députés du groupe SRC. La question !
M. Jean-François Copé. Pour nous, ce sera un rendez-vous de résultats ; pour la gauche, un rendez-vous de crédibilité. La gauche ne pourra désormais plus jouer à cache-cache avec les Français. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. – Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Il lui appartiendra de dire si elle est capable de gouverner, par exemple avec des Verts qui, hier soir encore – M. Hollande s’en souvient avec émotion –, nous ont expliqué qu’ils ne voulaient ni nucléaire ni nanotechnologies. Il faudra que la gauche ait dans ces domaines un rendez-vous de crédibilité. (Mêmes mouvements.)
M. le président. La parole est à M. François Fillon, Premier ministre.
M. Jean Glavany. Quelle est la question ?
M. François Fillon, Premier ministre. Mesdames et messieurs les députés, monsieur le président Copé, gouverner la France est difficile (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR), nous ne sommes pas les premiers à en faire l’expérience. Et c’est plus difficile encore lorsque notre pays est confronté à une crise économique et financière aussi brutale que celle que nous avons connue. (Mêmes mouvements.)
Nous avons subi une défaite électorale, et cela signifie clairement que nous n’avons pas su convaincre. Nous devons examiner cette situation avec beaucoup d’humilité…
Un député du groupe SRC. Oui !
M. François Fillon, Premier ministre. …et ajuster ensemble ce qui doit l’être.
M. Maxime Gremetz. Oh là là !
M. François Fillon, Premier ministre. Mais je tiens à dire devant l’Assemblée nationale qu’avec le Président de la République nous ne transigerons pas sur la nécessité de moderniser notre pays. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.) Nous sommes soixante-cinq millions de Français dans un monde de six milliards d’êtres humains ;…
Un député du groupe SRC. Jusque-là, ça va !
M. François Fillon, Premier ministre. …notre devoir est d’adapter notre organisation économique et sociale pour protéger les Français, leur mode de vie et leur prospérité.
M. Richard Mallié. C’est vrai !
M. Régis Juanico. Bouclier fiscal !
M. François Fillon, Premier ministre. Dans ce contexte, l’action du Gouvernement s’orientera dans les prochaines semaines autour de trois priorités.
La première priorité est la croissance et l’emploi.
M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Supprimez le bouclier fiscal !
M. François Fillon, Premier ministre. Nous devons ajuster nos dispositifs de lutte contre le chômage, d’autant que celui-ci s’inversera dans la deuxième partie de 2010, comme l’ensemble des prévisionnistes nous le disent. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Nous devons voter dans les meilleures conditions la loi de modernisation de l’agriculture, parce que c’est un des éléments de réponse importants à la crise très grave que rencontre l’agriculture française. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Nous devons mettre en œuvre très rapidement les investissements d’avenir. Je serai intransigeant sur l’affectation des 35 milliards d’euros que vous avez votés aux priorités décidées par le Gouvernement et la majorité parlementaire.
Nous devons de même amplifier les mesures en faveur du renforcement de la compétitivité de notre économie…
M. Jean Mallot. Bla-bla-bla !
M. François Fillon, Premier ministre. …et, dans cet esprit, j’indique que les décisions que nous prendrons en matière de développement durable doivent être mieux coordonnées avec l’ensemble des pays européens, afin de ne pas creuser le déficit de compétitivité avec notre voisin allemand. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Notre deuxième priorité est la réduction des déficits. C’est une priorité absolue dans un contexte de crise financière en Europe. Cela signifie que nous poursuivrons la tenue des dépenses de l’État, la révision générale des politiques publiques, et que nous continuerons à ne pas remplacer un fonctionnaire sur deux partant à la retraite (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP), parce que c’est une nécessité absolue pour lutter contre les déficits. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Nous soumettrons au Parlement la réforme de l’organisation territoriale et, enfin, nous engagerons ensemble une réflexion, que j’espère la plus consensuelle possible, pour faire en sorte que nos régimes de retraites soient financés d’une façon à la fois juste et efficace.
M. Maxime Gremetz. La majorité à la retraite !
M. François Fillon, Premier ministre. Enfin – troisième priorité –, nous voulons agir pour les deux piliers de notre pacte républicain que sont, d’une part, la sécurité, et, d’autre part, la laïcité et l’égalité entre les hommes et les femmes.
Pour la sécurité, il faut incontestablement inventer de nouvelles formes de lutte contre la délinquance et la violence qui s’adaptent, elles, en permanence à nos décisions. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe NC.)
Quant à la laïcité, il faut trancher la question, qui est un symbole, du voile intégral.
M. Jean Glavany. Question centrale ! Aux élections régionales, il n’a été question que de la burqa !
M. François Fillon, Premier ministre. Telles sont, monsieur le président du groupe UMP, les priorités du Gouvernement. Je souhaite remercier la majorité de son soutien. Avec le Président de la République, nous mettrons notre point d’honneur à respecter nos engagements, parce que l’honneur d’un responsable politique, c’est le courage et le respect de la vérité. (Mmes et MM. les députés des groupes UMP et NC se lèvent et applaudissent. – Huées sur quelques bancs des groupes SRC et GDR.)
Victimes de l’amiante
M. le président. La parole est à M. André Chassaigne, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
M. André Chassaigne. Monsieur le Premier ministre, je pourrais vous parler aujourd’hui de claque électorale (Rires sur plusieurs bancs des groupes GDR et SRC), des leçons à tirer de ce terrible désaveu de la politique que vous conduisez au profit de quelques privilégiés, mais je préfère évoquer des témoignages du quotidien recueillis au fil de multiples rencontres.
Nous avons tous entendu des mots de mal-être, des paroles de souffrance, des cris de colère. Nous avons tous rencontrés des paysans qui ne vivent plus de leur travail, au point d’en être écœurés, des ouvriers dont l’usine ferme brutalement trois ans après son rachat par un fonds de pension, des chefs d’entreprise abandonnés par les banques et qui ne peuvent plus honorer leurs commandes, des mères de famille qui n’ont plus d’emploi après avoir été baladées dix ans durant de contrat aidé en contrat aidé, des jeunes comme des retraités exprimant un terrible sentiment d’abandon.
Et tant d’autres, comme ces victimes de l’amiante aux aciéries Aubert et Duval, aux Ancizes, dans le Puy-de-Dôme ; vingt-cinq ont déjà eu la mort en héritage, mais les salariés attendent toujours, la rage au cœur et les poumons rongés, d’être inscrits sur la liste des établissements ouvrant droit au dispositif de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante. Ils attendent toujours alors que le tribunal administratif puis la cour d’appel leur ont donné raison.
Le poète René Char disait : « Il ne faut pas s’arrêter à l’ornière des résultats. » Allez-vous enfin, monsieur le Premier ministre, au vu des résultats électoraux, mettre de l’humanité dans votre politique ? Allez-vous, par exemple, faire appliquer une simple décision de justice pour que des salariés puissent bénéficier d’un dispositif auquel ils ont droit ? (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)
M. le président. La parole est à M. Éric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
M. Éric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique. Monsieur Chassaigne, je connais votre attachement à cette entreprise. Votre question concerne son inscription sur la liste des établissements ouvrant droit à la retraite anticipée pour les travailleurs de l’amiante.
C’est un sujet humainement très sensible ; on touche, concernant le risque d’exposition à l’amiante, à des situations individuelles douloureuses. C’est aussi un sujet complexe, sur lequel de nombreuses expertises ont été produites. Il s’agit d’évaluer le caractère significatif de l’exposition à l’amiante de certaines activités.
M. Patrick Roy. Oh !
M. Éric Woerth, ministre du travail. Comme vous l’avez rappelé, des décisions de justice ont été rendues. Ainsi, une décision du Conseil d’État du 30 décembre devrait conduire l’État à inscrire cette entreprise sur la liste en question.
Si c’était le cas, cette entreprise serait, je tiens à le dire, la seule aciérie de France à y être inscrite. Une telle décision serait lourde de conséquences pour l’organisation de l’entreprise puisqu’une bonne partie de ses employés seraient amenés à la quitter. La direction de l’entreprise et les syndicats, avec l’appui des services de l’État, réfléchissent donc à une solution alternative qui permette de satisfaire les salariés et de les protéger face aux risques pour leur santé, tout en évitant un dispositif général qui pourrait être préjudiciable au développement de cette entreprise dans votre département.
C’est un enjeu de santé de même qu’un enjeu social et industriel. Dans les jours qui viennent, nous aurons des solutions à vous présenter. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Réforme des retraites
M. le président. La parole est à M. François Sauvadet, pour le groupe Nouveau Centre.
M. François Sauvadet. Monsieur le Premier ministre, les élections régionales ont montré d’abord l’inquiétude et l’angoisse des Français face à une crise dont ils vivent dans leur vie quotidienne les conséquences. Ce sentiment s’est exprimé par un vote sanction incontestable pour la majorité présidentielle,…
M. Frédéric Cuvillier. Et ce n’est pas fini !
M. François Sauvadet. …mais aussi à travers une abstention très forte et par un vote extrême. Cette abstention et ce vote extrême constituent un message qui s’adresse à l’ensemble des partis politiques et à l’ensemble du Parlement.
Ce que les Français attendent, monsieur le Premier ministre, c’est une exigence plus forte en matière de justice et d’équité sociales. Il ne s’agit pas pour nous, au groupe Nouveau Centre, de remettre en cause la nécessité de la réforme. Les Français savent, au fond d’eux-mêmes, que celle-ci est nécessaire pour notre pays, nécessaire pour garantir l’avenir et la solidarité, et nous devons poursuivre l’effort de réforme. Mais nous considérons que les Français, par ce message, ont dit clairement qu’une réforme ne doit pas et ne peut pas faire l’économie de la justice et de l’équité sociales.
M. Frédéric Cuvillier. Quel aveu !
M. François Sauvadet. Nous avons devant nous plusieurs défis : l’accroissement des déficits publics, la très grande dépendance, les retraites, le pouvoir d’achat des plus fragiles, l’avenir du monde rural comme des quartiers sensibles. À cet égard, la gauche ne pourra pas continuer simplement à surfer sur les mécontentements.
Ce que nous attendons, nous, de cette réforme importante des retraites, qui n’a que trop attendu et à laquelle aucun gouvernement, y compris socialiste, ne s’est vraiment attelé, c’est que la garantie des retraites repose sur un effort juste et partagé. La prise en compte de la pénibilité du travail de chacun sera un des aspects essentiel de la réforme (Applaudissements sur les bancs du groupe NC), de même que, dans la perspective de l’uniformisation des régimes de retraite, la prise en compte des petites retraites et des pensions de réversion qui ne permettent plus à des petites gens de vivre leur quotidien.
Aussi, monsieur le Premier ministre, ma question est simple : quel va être le calendrier de cette réforme et dans quel esprit allez-vous aborder ce chantier à la lumière du récent scrutin ? (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)
M. le président. La parole est à M. Éric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique.
M. Éric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique. Monsieur le président Sauvadet, nous allons ensemble définir le calendrier de la réforme. Il sera très précis, ce qui va amener à avoir une discussion, un dialogue et une concertation très approfondis. La concertation va se dérouler dans les jours qui viennent, jusqu’au début de l’été, puis nous préparerons un texte pour le présenter devant le Parlement à partir du mois de septembre. Cela nous laisse du temps pour discuter des retraites, un sujet fondamental et majeur pour l’avenir des Français, comme vous l’avez dit. C’est la protection de nos systèmes de retraite qui est en jeu. Nous sommes là pour protéger la retraite par répartition. Il faut que les Français puissent bénéficier d’un système de retraite qui les assure pendant toute leur vie. Comme celle-ci dure de plus en plus longtemps, on doit réfléchir ensemble, sereinement, tranquillement, mais avec beaucoup d’obstination, à l’évolution du système de retraite.
Vous l’avez dit à juste titre, monsieur Sauvadet : nous devons être guidés par un seul souci, celui de l’équité et de la justice sociales.
M. Frédéric Cuvillier. Et le bouclier fiscal ?
M. Éric Woerth, ministre du travail. C’est parce que la réforme sera équitable que les Français la comprendront. Je suis évidemment ouvert, comme le Premier ministre et le Président de la République, à la plus grande concertation possible. Je rencontrerai bien sûr l’ensemble des organisations syndicales et tous les parlementaires qui souhaiteront s’exprimer sur ce sujet. J’échangerai avec les commissions compétentes et avec celles et ceux qui souhaitent nous éclairer sur la manière de réformer les retraites. Cette réforme se fera dans le consensus, la concertation, le dialogue et l’écoute. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)
Changement de politique après les régionales
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Ayrault, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
M. Jean-Marc Ayrault. Monsieur le Premier ministre, votre majorité n’a plus le soutien que d’un Français sur trois. À un tel niveau de défiance, on n’est plus seulement dans le cadre d’un vote régional, mais devant une sanction nationale qui met en demeure le Président de la République de modifier tout le reste du cours de son quinquennat, sa politique, son style, sa méthode. Or, à ce désaveu massif, vous avez répondu par un mini-remaniement gouvernemental. Je viens de vous écouter : au-delà des mots, c’est le déni de la réalité !
M. Jean-François Copé. Mais non, ne dites pas ça !
M. Jean-Marc Ayrault. Vous ne tirez aucune leçon de vos échecs ! Rien ne change dans vos priorités, si ce n’est l’abandon de la taxe carbone. À chaque revers, vous vous défaussez de vos responsabilités. C’est toujours la faute à la crise, à l’opposition, aux Français qui ne voudraient pas comprendre l’importance et le courage de vos réformes.
Non, monsieur le Premier ministre, l’impopularité n’est pas une politique ! Le courage n’est pas de gouverner contre les Français ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Le vrai courage, c’est de revoir de fond en comble la hiérarchie de vos priorités,…
M. Claude Goasguen. Oh, monsieur Ayrault !
M. Jean-Marc Ayrault. …c’est de reconstituer une politique de l’emploi après celle que vous avez détruite, d’en finir avec le système de privilèges institué par votre politique fiscale, d’arrêter ce grand plan de suppressions massives d’emplois publics, en particulier dans l’éducation nationale et la police. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Le vrai courage, c’est aussi d’arrêter de passer partout en force, d’avoir la patience de négocier une réforme juste des retraites et d’abandonner les réformes partisanes qui divisent les Français, comme la réforme territoriale ou la suppression du juge d’instruction.
Monsieur le Premier ministre, vous ne pouvez plus faire comme si rien ne s’était passé. Votre légitimité est atteinte. La confiance est partie. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Pour exiger du pays qu’il change, il faut d’abord que vous-même changiez ! Faire le choix de la continuité, c’est faire le choix de l’enlisement ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
M. le président. La parole est à M. François Fillon, Premier ministre. (« C’est scandaleux ! » sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
M. Jean-Marc Ayrault. Je n’avais pas terminé, monsieur le président.
M. Henri Emmanuelli. Ça ne peut pas durer comme ça !
M. le président. Le temps de parole attribué a été le même que précédemment, mes chers collègues. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le Premier ministre, vous avez la parole.
M. François Fillon, Premier ministre. Monsieur le président Ayrault, vous me demandez si le Gouvernement va tenir compte du résultat des élections régionales. Je vous réponds que oui, nous allons tenir compte du succès des listes de gauche aux élections régionales.
M. Maxime Gremetz. Ça m’étonnerait !
M. François Fillon, Premier ministre. Votre parti présidera vingt-deux ou vingt-trois régions sur vingt-six. C’est une responsabilité considérable et je veux, dans un esprit républicain, saluer ceux et celles qui, demain, vont diriger les régions françaises. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.) Ils vont le faire dans un contexte de crise économique et sociale qui rend cette responsabilité d’autant plus importante. Il est essentiel, dans ce contexte, que nous coordonnions le mieux possible les politiques économiques locales et les politiques économiques nationales.
M. Jérôme Lambert. Et la politique gouvernementale ?
M. François Fillon, Premier ministre. J’espère que, dans un climat d’unité républicaine, nous pourrons y parvenir. Les régions ne sont pas des contre-pouvoirs. Ce sont des éléments constitutifs de la nation et de l’État. Je prendrai dans les prochaines semaines des initiatives pour voir, avec les présidents de région, comment nous pourrions mieux coordonner nos efforts face à la crise économique et sociale. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Mais le vote de dimanche n’a rien changé aux défis que doit relever la France : il n’a rien changé aux problèmes de compétitivité de l’économie française, notamment au regard de son grand voisin allemand, il n’a rien changé à la question de l’endettement, question si cruciale dans un contexte de crise financière en Europe (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR),…
M. Henri Emmanuelli. Vous parlez d’endettement, mais à qui la faute ?
M. François Fillon, Premier ministre. …pas plus qu’à la nécessité de protéger notre modèle social face à l’allongement de la durée de la vie. Oui, nous allons amplifier nos efforts pour relever ces défis et pour protéger les Français. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Quant à vous, que proposez-vous ? Vous voulez que l’on arrête tout ce qui est mis en œuvre ; et pour le remplacer par quelle politique ? Par l’immobilisme, qui conduirait évidemment à la destruction de notre système de retraite. (Mêmes mouvements.) Vous nous proposez de remplacer notre politique par un projet socialiste qui n’existe pas – en tout cas pas encore. Depuis 2007, la France a déjà beaucoup changé et, durant cette campagne, je n’ai pas entendu de Français me réclamer la suppression de l’autonomie des universités ou la suppression du revenu de solidarité active, ou encore me proposer le rétablissement des droits sur les petites et les moyennes successions ! (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur Ayrault, si votre question signifiait : allez-vous faire demi-tour ? ma réponse est « non ». (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Tempête Xynthia : zones inondables
M. le président. La parole est à M. Dominique Caillaud, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
M. Dominique Caillaud. Merci monsieur le président, pour votre attention et celle de l’Assemblée aux sinistrés de Xynthia ; ils y sont sensibles.
Ma question s'adresse au ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer. Monsieur le ministre d’État, la nuit du 28 février 2010 marquera durablement, l'histoire de la Charente-Maritime et de la Vendée par l'ampleur et la brutalité de la catastrophe subie.
En Vendée, aux 31 morts dont 29 dans la seule commune de la Faute-sur-Mer, aux nombreux blessés et sinistrés, se sont ajoutés des dégâts matériels et économiques immenses sur tout le littoral.
Personne n'avait imaginé, dans un scénario catastrophe, autant d'éléments réunis simultanément – tempête de sud-ouest, dépression brutale, grande marée – déclenchant, en pleine nuit, cet incroyable déferlement de mer sur des habitants endormis.
Je veux ici remercier tous ceux – élus, population, sapeurs-pompiers, secouristes, bénévoles – qui ont donné l'exemple d'une solidarité immédiate et chaleureuse et d'une efficacité remarquable. Cette solidarité est devenue régionale et nationale, et nous en gardons à tous une profonde gratitude.
La présence du Président Nicolas Sarkozy à vos côtés, monsieur le ministre d’État, celle du Premier ministre François Fillon, celle des nombreux ministres concernés, et celle du commissaire européen Hahn ont témoigné de la compassion de l'État pour les familles des victimes, et de sa volonté d'apporter au plus vite les moyens matériels et financiers attendus en urgence.
Chacun a pu apporter les contributions possibles, soyez-en tous individuellement remerciés au nom des sinistrés.
Ma question, monsieur le ministre d’État, fait suite à la proposition du Président Sarkozy, lors de sa venue, d’accélérer les plans de prévention des risques et de réglementer deux catégories de zones inondables : celles à risque mortel avec construction ou reconstruction interdites ; celles à risque acceptable avec des aménagements spécifiques.
Aussi, monsieur le ministre d’État, pouvez-vous nous préciser quelles seront les procédures techniques et juridiques de définition de ces zones à risque mortel (« Et le respect du temps de parole ? » sur les bancs des groupes SRC et GDR),…
M. le président. Veuillez conclure.
M. Dominique Caillaud. …quels services auront la charge de cette définition (Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR) et…
M. le président. Merci, monsieur Caillaud.
La parole est à M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Je vous prie de m’excuser, mes chers collègues. La nature de la question appelle une certaine solennité.
M. Henri Emmanuelli. Vous êtes un rigolo !
M. Jean Glavany. Président partial !
M. le président. Monsieur le ministre d’État, vous avez la parole.
M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat. Monsieur le président, mesdames et messieurs, étant donné la gravité de ce drame qui a fait 53 victimes, nous pourrions avoir un échange apaisé.
Monsieur Dominique Caillaud, je tiens d’abord à vous remercier d’avoir rappelé l’action des élus et des associations, et témoigné de la solidarité des services publics de toute nature, en un moment particulier qui a fait ressortir ce qu’il y a de meilleur dans notre pays.
Le Président de la République, qui s’est rendu deux fois sur les lieux, a été parfaitement clair le 15 mars : il n’est pas question de prendre le moindre risque en matière de construction ou de retour dans des habitations situées en zones de risques. C’est parfaitement clair !
Avec nos services respectifs, ceux de Benoist Apparu et ceux des deux conseils généraux – je remercie au passage le président Dominique Bussereau –, les deux préfets établissent une cartographie extrêmement précise des systèmes d’isolation nécessaires mais aussi des maisons qu’il faudra mettre hors d’état d’habitation.
Nous ne prendrons pas le risque d’un retour des populations ; nous engagerons les procédures d’arrêté de péril et les procédures de rachat, après débat avec les collectivités territoriales. L’État et le fonds Barnier seront mobilisés. En tout état de cause, nous assurerons la sécurité de nos concitoyens. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Situation sociale
M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
M. Roland Muzeau. Monsieur le Premier ministre, le sarkosysme et la droite parlementaire sortent désavoués des élections régionales. La déroute est telle que, dans le département des Hauts-de-Seine, fief de la majorité présidentielle, la gauche est majoritaire. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes SRC et GDR.)
M. Yves Nicolin. Ne fantasmez pas !
M. Roland Muzeau. Dans les urnes, nos concitoyens ont majoritairement sanctionné les choix de classe du Président de la République, inefficaces économiquement, injustes socialement, dangereux pour le vivre ensemble.
Les Français n'en peuvent plus de l'insolente prospérité de quelques privilégiés et de l'austérité toujours plus grande pour les plus modestes.
Un an et demi après le début de la crise financière, les Français la paient au prix fort et au quotidien. La finance est repartie de plus belle. Les salaires sont bloqués et le chômage explose. Les grandes entreprises du CAC 40 vont verser 35 milliards d'euros de dividendes aux actionnaires sur les 49 milliards d’euros de bénéfices engrangés l'an dernier.
M. Jean-Michel Fourgous. C’est 1 % du chiffre d’affaires !
M. Roland Muzeau. Ils serviront la spéculation au détriment de l'investissement, des salaires et de l'emploi.
En 2009, quelque 8 000 traders se sont partagé 1,8 milliard d’euros de bonus, alors que 10 % de la population active est au chômage et que la saignée de l'emploi continue. Pour le seul secteur marchand, 120 000 emplois devraient encore être détruits cette année.
Pourtant, le Gouvernement n'a toujours rien décidé en matière d'indemnisation des demandeurs d'emploi et du million de chômeurs en fin de droits en 2010. L'État employeur en rajoute : il supprimera 33 000 postes de fonctionnaires cette année encore.
Le surendettement a bondi de 15 % en un an. Plus de cinq millions de retraités doivent se contenter d'une pension comprise entre 800 et 1 000 euros. La situation des femmes est pire encore.
Dans la rue, aujourd'hui, ces mêmes questions sont aux lèvres de centaines de milliers de manifestants. Entendez leurs aspirations à la justice et à la solidarité nationale ! Réveillez-vous !
Monsieur le Premier ministre, il y a urgence. Allez-vous convoquer une conférence nationale sur les salaires ? Allez-vous financer une allocation spécifique de crise en faveur des chômeurs en fin de droits ? Allez-vous enfin prendre des engagements concernant le maintien à soixante ans de l'âge légal du départ en retraite et le niveau minimum des pensions ? (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)
M. le président. La parole est à M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l’emploi. (Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
M. Maxime Gremetz. Ah non ! C’est au Premier ministre de répondre ! Il y a des manifestants dans la rue !
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l’emploi. Monsieur Muzeau, le Premier ministre a rappelé à l’instant une conviction que nous partageons tous : l’emploi est la préoccupation majeure de tous nos compatriotes et celle de tous leurs représentants dans cette assemblée.
En cette période de crise, nous devons penser à ceux qui ont perdu leur emploi et particulièrement à ceux qui arrivent au bout de leurs droits à indemnités de chômage. Je pense plus particulièrement à ces familles de classe moyenne et modeste où deux sources de revenu entraient dans le foyer avant la crise, et où il n’y en a plus qu’une seule actuellement en raison d’une situation de fin de droits.
M. Pierre Gosnat. À qui la faute ?
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Avec Christine Lagarde, nous avons donc travaillé d’arrache-pied avec les partenaires sociaux, pendant tout le mois de mars, sur ce sujet. Nous avons tenu plus de seize réunions de travail et deux réunions bilatérales, sans même évoquer le sommet social sur l’emploi qui aura lieu autour du Président de la République au cours des semaines à venir.
Vous avez évoqué le nombre d’un million de chômeurs en fin de droits en 2010. Pour deux de ces personnes sur trois, il y a une réponse par le biais de la solidarité nationale. Aux 360 000 autres, nous devons apporter une réponse afin de les protéger en cette année qui restera difficile.
Nous avons commencé. Le rétablissement de l’allocation équivalent retraite, cette année, apporte une réponse aux demandeurs d’emploi seniors.
Nous avons poursuivre en appliquant un principe qui a été acté avec les partenaires sociaux, le cofinancement : un euro apporté par les partenaires sociaux, un euro par l’État. Nous travaillons ensemble, sans jeu de balle de ping-pong.
Hier, les partenaires sociaux ont demandé que nous puissions solliciter les régions pour la formation des demandeurs d’emploi, puisqu’elles ont des compétences dans ce domaine.
Enfin, le but n’est pas seulement d’apporter une réponse en termes de rémunération. On ne peut pas répondre uniquement sous forme d’assistanat. Il faut aussi aider les gens à retrouver un emploi et à se reconvertir, au moyen d’un outil principal : la formation.
Dans les prochains jours, vous pourrez juger du travail accompli avec les partenaires sociaux. Il ne s’agit pas là d’un choix de classe, mais d’une réponse républicaine. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Négociations avec les laboratoires
sur les vaccins contre la grippe A
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
M. Jean-Pierre Door. À la fin de l’année 2009, madame la ministre de la santé et des sports, notre pays a été touché, comme deux cents autres, par une épidémie de grippe sans précédent, la grippe A (H1N1). Je tiens une nouvelle fois, malgré les polémiques stériles et inutiles, à vous féliciter pour la gestion de cette crise sanitaire. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
L’heure est aujourd’hui au bilan. En effet, à l'occasion de cette épidémie, l'État français avait commandé 94 millions de doses de vaccin à quatre laboratoires pharmaceutiques, pour un montant de 700 millions d'euros. Bien que le virus circule toujours, la pandémie a été moins virulente que prévu, et seulement 5,5 millions de personnes ont été vaccinées.
Une mission de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques a étudié la situation d’autres pays ; ses membres se sont rendus à l’OMS il y a quelques jours pour analyser la crise et étudier la question des vaccins, ce qui donnera lieu à un rapport.
Il y a quelques semaines, madame la ministre, vous vous étiez engagée, avec l’établissement public responsable, à revoir les contrats passés avec les laboratoires pharmaceutiques. Ce matin, un quotidien français affirmait que l'État allait débourser 48 millions d’euros, au lieu des 358 millions initialement prévus pour la commande de 50 millions de vaccins, laquelle sera de fait annulée.
Le laboratoire Novartis a signé l'accord de résiliation avec l’EPRUS, l’Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires ; quant aux deux autres laboratoires, les négociations avec l’État sont en cours.
Pouvez-vous, madame la ministre, infirmer ou confirmer l’annonce de ces résultats très satisfaisants, notamment au regard des conditions de résiliation dans les autres pays ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)
M. Roland Muzeau. Et l’arnaque des laboratoires, vous n’en parlez pas ?
M. le président. La parole est à Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports.
M. Patrick Roy. Et des franchises médicales !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports. Votre question, monsieur Door, anticipe sur la réponse que je m’apprête à faire, cet après-midi, à la commission d’enquête parlementaire du Sénat.
Les autorités sanitaires européennes ayant annoncé qu’une autorisation de mise sur le marché pouvait être accordée au vaccin administré en une seule dose, j’ai résilié, le 4 janvier dernier, la commande de 50 millions de doses auprès de trois laboratoires : 32 millions de doses auprès du laboratoire GSK ; 11 millions auprès du laboratoire Sanofi, qui a d’ailleurs résilié de lui-même, pour ainsi dire gratuitement, la commande de 9 millions de doses ; 7 millions de doses, enfin, auprès du laboratoire Novartis.
Nous avons pris cette décision en vertu du pouvoir unilatéral de résiliation de la puissance publique, mais ce pouvoir s’accompagne évidemment d’une indemnisation. Le 11 janvier, nous avons donc confié au directeur de l’EPRUS le mandat de négocier avec les laboratoires, ce qu’il a fait en suivant deux principes. Le premier est que les trois laboratoires soient traités de la même façon ; le second est qu’ils ne soient indemnisés que sur la base des dépenses effectivement engagées, et non sur celle d’un éventuel manque à gagner.
Comme vous l’avez indiqué, monsieur le député, c’est sur cette base précise, qui représente en l’occurrence 16 % du marché initial, que l’accord avec le laboratoire Novartis a été conclu. Nous allons mener la négociation à son terme avec les deux autres laboratoires. Vous comprendrez que je garde une certaine confidentialité sur le sujet ; si toutefois les négociations, que je souhaite transactionnelles, n’aboutissaient pas,…
M. le président. Merci, madame la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé. …il y aurait une notification unilatérale sur la même base. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)
Réformes territoriales et régions d’outre-mer
M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
M. Victorin Lurel. Si vous n’avez pas entendu ou pas voulu comprendre le message des Français, monsieur le Premier ministre, nous l’avons de notre côté bien compris : ils demandent la suppression du bouclier fiscal et des déremboursements de médicaments (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC), ainsi qu’une réforme plus juste et plus équilibrée des retraites.
Vous avez engagé une formidable entreprise de recentralisation, dont la caractéristique principale consiste à affaiblir durablement les pouvoirs locaux et à anéantir l'opposition. Cette entreprise globale, faite au nom de la simplification, de la clarification et des économies, comporte plusieurs volets : la suppression de la taxe professionnelle, décision qui asphyxie financièrement les collectivités (« Oui ! » sur plusieurs bancs du groupe SRC – Protestations sur les bancs du groupe UMP) ; le projet de loi relatif au Grand Paris, qui dessaisit les élus franciliens du dossier ; le retour d'une culture préfectorale interventionniste et activiste ; le redécoupage électoral, qui vise à laminer la gauche ; cette fameuse réforme des collectivités territoriales, enfin, avec la création ex abrupto du conseiller territorial, lequel sera élu selon un mode de scrutin étrange et brutal qui, peu conforme à la tradition républicaine, porte atteinte à l'objectif constitutionnel de parité et se révèle outrageusement complaisant à l'égard du parti du chef de l’État.
En guise de simplification, cette réforme relève de la manipulation ; en guise de clarification, elle crée la confusion et renvoie aux calendes grecques la répartition des compétences entre les différents échelons ; en guise d'économies, elle porte en tout et pour tout sur une somme représentant un millième des dépenses de fonctionnement des budgets locaux, soit 70 millions d’euros.
Monsieur le Premier ministre, le couperet des urnes est tombé : c’est un désaveu cinglant de la politique conduite depuis 2007. Le vote de dimanche dernier est un plébiscite des Français contre la régression démocratique que vous avez engagée. Le Président de la République prétend qu'il n'est ni sourd, ni autiste, et vos amis osent penser…
M. le président. Merci, monsieur Lurel.
M. Victorin Lurel. …qu’il ne vit plus au pays des Bisounours. Comment comptez-vous renoncer… (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
M. le président. La parole est à M. Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
M. Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales. Monsieur Lurel, les territoires ultramarins se sont prononcés de manière équilibrée. Vous-même avez été réélu, et bien réélu en Guadeloupe (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC) ; l’un de vos collègues du groupe socialiste, M. Serge Letchimy, a été élu en Martinique. De même, des responsables de la majorité, ou qui s’en réclament, ont été élus : Rodolphe Alexandre en Guyane et votre collègue Didier Robert à La Réunion. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Le message est donc simple. S’agissant des territoires ultramarins, vous avez été attentif aux engagements pris dans le cadre des États généraux. Ces engagements, dont je rappelle brièvement l’objet, seront intégralement tenus : favoriser la concurrence pour faire baisser les prix ; rénover les relations entre la métropole et les territoires ultramarins ; faire le maximum en faveur du développement économique endogène. Lors des États généraux, nous nous sommes engagés ensemble sur 137 mesures ; toutes seront appliquées.
Les électeurs ont-ils, par leur vote de dimanche dernier, salué la clarté, la cohérence ou la simplicité de notre système territorial ? Vous êtes certainement le seul sur ces bancs, monsieur Lurel, à penser que tel est le message qu’ils nous ont adressé. (« Non ! » sur les bancs du groupe SRC.) Un effort de simplification et de lisibilité est bel est bien nécessaire ; il a déjà été engagé par un vote au Sénat, et votre assemblée sera bientôt appelée à en débattre. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP. – Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
Tempête Xynthia : contribution des fonds européens
M. le président. La parole est à M. Didier Quentin, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
M. Didier Quentin. Ma question s’adresse à M. Pierre Lellouche, secrétaire d’État chargé des affaires européennes.
Monsieur le secrétaire d’État, à la suite de la tempête Xynthia qui a fortement meurtri le littoral charentais et vendéen, nous avons été très sensibles à votre visite sur le terrain le jeudi 4 mars. Vous avez ainsi pu prendre toute la mesure du drame qui a très durement frappé les populations de Charente-Maritime et de Vendée.
Le commissaire européen à la politique régionale, M. Johannes Hahn, qui vous accompagnait, nous a assuré qu’il contribuerait à mobiliser dans les meilleures conditions les instruments financiers dont dispose l’Union européenne pour venir en aide aux sinistrés et faire jouer à plein la solidarité européenne. Il a notamment évoqué l’activation du Fonds de solidarité de l’Union européenne ou une réorientation du programme opérationnel FEDER.
Il conviendra aussi de veiller à ce que le plan d’urgence pour l’ostréiculture, d’un montant de 20 millions d’euros, soit bien eurocompatible et que les procédures soient conduites le plus rapidement possible compte tenu de la nouvelle crise sanitaire qui touche de plein fouet nos bassins de production conchylicole. Il y a vraiment urgence et beaucoup de gens dans la désespérance ne comprendraient pas que les aides soient retardées pour des raisons d’eurocompatibilité.
Monsieur le secrétaire d’État, pouvez-vous nous apporter des précisions sur les aides que la Commission européenne entend mettre en œuvre pour nous aider à reconstruire les infrastructures détruites, notamment les digues, et à relancer l’économie littorale et touristique des deux départements sinistrés ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
M. le président. La parole est à M. Pierre Lellouche, secrétaire d’État chargé des affaires européennes.
M. Pierre Lellouche, secrétaire d’État chargé des affaires européennes. Monsieur le député, avec le Président de la République, le Premier ministre et de nombreux collègues du Gouvernement, le secrétariat d’État aux affaires européennes a été mobilisé dès le premier instant après le passage de la terrible tempête qui a ravagé plusieurs régions de notre pays.
Dès le lendemain, le lundi, j’étais à Bruxelles pour déclencher en urgence le Fonds de solidarité. À mon invitation, le commissaire européen autrichien, Johannes Hahn, s’est rendu sur place à mes côtés pour rencontrer les élus et les populations sinistrées.
À travers vous, monsieur Quentin, je voudrais rendre hommage à l’ensemble des élus, de tous les bancs, qui se sont mobilisés, et qui le sont encore, pour gérer les conséquences de la catastrophe.
L’aide de l’Union européenne se décompose en trois volets.
D’abord, le Fonds de solidarité de l’Union européenne sert à dédommager l’État et les collectivités pour les investissements d’urgence, notamment ceux concernant l’hébergement et les besoins immédiats.
Ensuite, le commissaire européen a accepté – c’est une nouveauté – la réaffectation de crédits FEDER pour venir en aide à la population, notamment pour la reconstruction des digues : il s’agit de plusieurs millions d’euros. L’État va abonder ces sommes et j’invite les collectivités territoriales à faire de même.
Enfin, le Fonds agricole et le Fonds de la pêche européens – j’en prends à témoin mon collègue Bruno Le Maire – seront mobilisés pour venir en aide aux secteurs les plus touchés, notamment à la conchyliculture, qui est sinistrée.
Nos concitoyens considèrent souvent que l’Europe est trop distante et trop lourde : cette fois, elle s’est mobilisée rapidement et efficacement dans des circonstances dramatiques. Nous serons très attentifs, dans la suite, à la gestion de ces fonds avec l’Union européenne. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Charges des régions et financement d’ITER
M. le président. La parole est à M. Michel Vauzelle, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Plusieurs députés du groupe UMP. Merci au Front national !
M. Michel Vauzelle. Monsieur le Premier ministre, l’attente angoissée du peuple français, qui s’est exprimé dimanche, a enfin reçu la réponse espérée depuis si longtemps : l’entrée de M. Tron et de deux nouveaux ministres au Gouvernement ! (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Le peuple a compris que vous l’aviez compris, et la majorité vient de se lever, à l’instant, pour vous rendre hommage.
Vous renvoyez les présidents de région à leurs responsabilités régionales. Mais ce n’est pas votre genre car, chaque jour, vous et vos ministres, vous chargez un peu plus les régions et les collectivités locales des affaires de l’État, que vous démantelez et privatisez pan par pan. Les régions sont maintenant chargées d’une part de l’éducation dite autrefois « nationale », de la santé dite autrefois « publique », des grands investissements, dont 75 % – Dieu merci pour les Français ! – sont assurés par les collectivités territoriales. Aujourd’hui, vous vous proposez de supprimer les régions tout en vous adressant à leurs présidents.
Il y a même, en Provence-Alpes-Côte-d’Azur, un équipement unique au monde, ITER, qui devrait être financé par les États – la Chine, les États-Unis, la France –, qui porte les espoirs du monde entier, mais que le Premier ministre demande à la région de financer. (« Vous cédez aux Verts ! » et huées sur les bancs du groupe UMP.) Écoutez la colère d’une majorité qui découvre que l’État ne fait plus son travail : la Provence, Marseille et Nice ont répondu en votant pour la gauche ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Vives protestations sur les bancs du groupe UMP.)
M. le président. La parole est à M. François Fillon, Premier ministre.
M. François Fillon, Premier ministre. Monsieur le président Vauzelle, là, vous y allez un peu fort ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC. – Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Nous nous sommes battus ensemble pour faire venir le projet ITER en Provence-Alpes-Côte-d’Azur. Nous étions en compétition avec les Japonais et les Espagnols. Vous vous êtes engagé fortement à nous aider, et je vous en remercie. Mais là, parce que vous avez été élu – à l’occasion d’une élection triangulaire dont on pourrait parler (Huées sur les bancs du groupe UMP) – grâce à une coalition avec les écologistes, vous essayez de vous dégager de votre responsabilité. Je trouve cela honteux ! Cela augure assez mal du fonctionnement de certaines coalitions dans les régions. (Mmes et MM. les députés du groupe UMP se lèvent et applaudissent vivement.)
Violences dans les stades
M. le président. La parole est à M. Bernard Depierre, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
M. Bernard Depierre. Ma question s’adresse à M. Brice Hortefeux, ministre de l’intérieur.
Le sport, c’est l’école de la vie : on y apprend l’effort, la ténacité, le respect des autres, équipiers comme adversaires. Le sport, c’est aussi une fête. Comme des millions de nos compatriotes, j’aime le sport, qu’il soit amateur ou professionnel. J’aime les moments de partage qu’il nous offre.
Or, aujourd’hui, les actes de violence ont tendance à se répéter quasiment tous les week-ends à l’occasion de rencontres sportives, matchs de football en particulier : combats de rue en marge du match Rennes-Toulouse le week-end dernier ; quelques semaines plus tôt, du côté du Parc des Princes, bagarres entre supporters parisiens, au cours desquelles l’un d’entre eux a été mortellement blessé.
Nous ne pouvons tolérer qu’une poignée d’individus racistes, stupides et violents se permettent, au mépris du sport, au mépris des sportifs et des spectateurs, d’insulter les joueurs, de casser les installations collectives, ou se livrent à des violences physiques.
C’est pourquoi, avec mon collègue Richard Mallié et l’appui de plus de cent députés, nous avons déposé une proposition de loi visant à allonger la durée d’interdiction de stade de 6 à 24 mois, ou 36 mois en cas de récidive.
Le texte vise aussi à associer les fédérations et les supporters à ce combat en leur communiquant les noms des interdits de stade pour qu’aucun billet ne leur soit délivré.
Monsieur le ministre, la réponse donnée à ce problème à l’occasion de la nouvelle loi sur les bandes est peut-être encore trop timide. C’est pourquoi je souhaite connaître votre position sur notre proposition de loi et les solutions que vous envisagez afin de mettre un terme à ce déchaînements de violence.
M. le président. La parole est à M. Brice Hortefeux, ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales.
M. Brice Hortefeux, ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales. Vous avez raison, monsieur le député : il faut donner un coup d’arrêt définitif à ces violences absurdes qui, concrètement, ont tout récemment abouti à ce qu’un hooligan tue un autre hooligan.
M. Jean Glavany. Cela fait huit ans que vous êtes au pouvoir !
M. Brice Hortefeux, ministre de l’intérieur. Ce sont des violences auxquelles il faut mettre un terme.
Pour ce faire, nous avons déjà pris un certain nombre d’initiatives, avant même les événements que vous avez évoqués. Tout d’abord, nous avons créé, au sein de la direction de la sécurité publique, une division nationale de lutte contre le hooliganisme. De même, nous avons créé des sections d’intervention rapide capables de réagir pendant les matchs.
Je vous le dis, comme à M. Glavany, que ces sujets intéressent également : depuis le début de la saison, 556 interpellations ont été effectuées, soit une augmentation de plus de 20 %.
M. Jean Glavany. C’est rien du tout ! Il y a 5 000 interpellations en Angleterre !
M. Brice Hortefeux, ministre de l’intérieur. Naturellement, des réunions se tiennent, dans le même temps, avec les ligues, avec la fédération et avec les clubs.
Ensuite, la loi du 2 mars dernier, vous avez raison, nous a donné de nouveaux instruments. Désormais, des interdictions administratives de stade, d’une durée pouvant aller jusqu’à 12 mois, sont effectivement prononcées, et l’éventuelle transgression de ces interdictions est passible d’une année de prison.
Aujourd’hui, ce sont 686 interdictions de stade qui ont été prononcées. Le mois dernier, ce nombre n’était que de 311.
Enfin, je vous le dis très clairement, je n’hésiterai pas à utiliser toutes les voies de droit permettant de mettre un terme à ce fléau.
M. Jean Glavany. Il serait temps !
M. Brice Hortefeux, ministre de l’intérieur. Qu’est-ce que cela veut dire ? Cela signifie que, s’il faut des tribunes vides, il y aura des tribunes vides. Tel a déjà été le cas, à l’initiative de la ligue. Ce sera également le cas ce soir, à mon initiative, pour éviter, à Auxerre, tout affrontement entre les hooligans du PSG.
Faut-il aller plus loin en interdisant certains déplacements de supporters ? Je ne l’exclus absolument pas, et il faudra peut-être légiférer sur ce sujet.
Nous sommes donc engagés, monsieur Depierre, dans une guerre, une guerre contre le hooliganisme, une guerre à toutes les bandes violentes qui empoisonnent la vie des honnêtes gens. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
Réforme des collectivités territoriales
M. le président. La parole est à M. Alain Rousset, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
M. Michel Herbillon. Refaites-nous la question de M. Vauzelle, monsieur Rousset !
M. Alain Rousset. Tout à l’heure, monsieur le Premier ministre, vous avez dit entendre le message des Français. Je crois qu’ils ont affirmé leur adhésion et leur confiance à l’égard des régions et de la façon dont elles sont gérées.
M. Yves Nicolin. 50 % d’abstention, quel succès !
M. Alain Rousset. Cela dit, et malgré une grande fierté, nous sortons de ces élections avec un goût amer dans la bouche. La campagne de dénigrement engagée par le Gouvernement, notamment sur le plan fiscal, était indigne. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et quelques bancs du groupe GDR.) Elle l’était car, en même temps que vous évoquiez les problèmes de fiscalité des régions avec des propos aussi insensés que ceux que M. Bertrand a pu tenir, vous nous demandiez d’augmenter la taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers pour financer les grandes infrastructures que l’État ne peut plus financer aujourd’hui. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et quelques bancs du groupe GDR.)
Les régions portent la créativité et l’innovation, qu’elles financent aujourd’hui autant que l’Agence nationale de la recherche. Puisque je vous avais proposé, au nom des régions de France, d’engager un dialogue à l’occasion de cette crise, je vous demande, monsieur le Premier ministre, de ne pas nous considérer comme des services extérieurs de l’État ; je vous demande d’accepter que nous puissions au contraire coopérer, comme cela se fait dans tous les pays d’Europe sauf chez nous ; enfin, je vous demande de retirer un texte, celui de la réforme des collectivités territoriales, qui fait l’unanimité contre lui. (Vives protestations sur les bancs du groupe UMP.)
Retirez-le, monsieur le Premier ministre, et engageons d’autres discussions.
Je souhaite que vous nous répondiez sur ces deux points. Dans l’intérêt de la France et de ses régions, nous serons de toute manière disponibles et ouverts à toute discussion.
M. le président. La parole est à M. Alain Marleix, secrétaire d’État à l’intérieur et aux collectivités territoriales. (Vives protestations sur les bancs du groupe SRC.)
M. Alain Marleix, secrétaire d’État à l’intérieur et aux collectivités territoriales. Vous estimez en somme, monsieur le député, que la réforme des collectivités territoriales viserait à casser les régions ou à leur ôter une partie de leurs prérogatives. Ces propos sont assez surprenants, d’autant que votre collègue et ami politique Claudy Lebreton, président de l’Assemblée des départements de France, pense tout à fait le contraire. Il écrit effectivement partout que notre réforme vise à conforter les régions au détriment des départements. Il faudrait, chez vous, un peu de cohérence. Vous n’étayez d’ailleurs votre démonstration d’aucun élément objectif et précis.
Je crois important de bien resituer ce débat. Notre réforme, vous le savez bien car nous en avons souvent discuté tous les deux, pérennise le département et la région, ce qui est fondamental. Une clarification est cependant nécessaire car, depuis trente ans, les réformes successives ont ajouté des compétences nouvelles sans jamais simplifier. Il importe donc, notamment grâce à l’institution d’un élu comme le conseiller territorial, d’optimiser les moyens de ces deux collectivités et les politiques qu’elles mènent. Le contribuable, soyez-en sûr, y trouvera son compte. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Comme vous le savez, un cinquième texte visera à clarifier le partage des compétences entre régions et départements pour que ces collectivités puissent exercer non seulement des compétences d’attribution, mais aussi un pouvoir d’initiative et des compétences partagées dans des domaines comme la culture et le sport.
Votre contribution de député et de président de l’Association des régions de France à ce débat retient toute l’attention du Gouvernement…
M. le président. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État.
Feuille de route du ministre de la jeunesse
et des solidarités actives
M. le président. La parole est à M. Charles-Ange Ginesy, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
M. Charles-Ange Ginesy. Ma question s’adresse à M. Marc-Philippe Daubresse, qui vient d’être nommé ministre de la jeunesse et des solidarités actives, et je tiens à lui apporter mon soutien plein et entier dans ses nouvelles fonctions.
Dans la crise que nous traversons, les jeunes risquent d'être les principales victimes. Je pense notamment à ceux qui viennent d'entrer sur le marché du travail. En tant que responsables politiques, nous ne pouvons pas admettre qu'une ou deux classes d'âge soient ainsi professionnellement et socialement sacrifiées. Nous nous devons d'agir pour cette génération.
De plus, aujourd'hui, sept millions de personnes vivent en France sous le seuil de pauvreté, dont deux millions d'enfants. Parmi les adultes en situation de pauvreté, on compte autant de personnes exclues de l'emploi que de femmes et d'hommes qui vivent dans la pauvreté bien que travaillant.
Monsieur le ministre, le visage de la pauvreté a changé. Vingt ans après la création du revenu minimum d'insertion, nos politiques de lutte contre la pauvreté doivent évoluer. Votre prédécesseur, M. Martin Hirsch, a déjà œuvré dans ces domaines, avec l'ouverture du revenu de solidarité active aux jeunes actifs de moins de vingt-cinq ans, le lancement du chantier du service public de l'orientation, les nouveaux programmes expérimentaux en faveur de la jeunesse et, enfin, la création du service civique : autant de mesures qui figurent désormais dans la nouvelle équation sociale.
Quelles sont les orientations que vous souhaitez suivre et les marges de manœuvre dont vous disposez ? Quels sont les axes sur lesquels vous souhaitez peser pour donner à notre jeunesse la dimension qu'elle mérite ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
M. le président. La parole est à M. Marc-Philippe Daubresse, ministre de la jeunesse et des solidarités actives.
M. Marc-Philippe Daubresse, ministre de la jeunesse et des solidarités actives. Monsieur le député, en décidant de faire de la jeunesse et de la lutte contre la pauvreté un ministère de plein exercice, le Président de la République et le Premier ministre ont voulu à la fois saluer l’action menée par Martin Hirsch dans la conception de tous les programmes que vous venez de rappeler et montrer que la jeunesse et la lutte contre la pauvreté étaient au centre des priorités du Gouvernement dans cette période de sortie de crise.
Ma feuille de route est très simple.
S’agissant du revenu de solidarité active, c’est la feuille de route qui a été tracée par le Parlement, et singulièrement par cette assemblée. J’ai été rapporteur de la loi et j’ai entendu les députés sur tous les bancs, qui ont beaucoup amélioré le projet. J’entends donc appliquer cette loi avec un seul mot clé, le terrain : aller sur place, rencontrer les acteurs, simplifier les dispositifs, les rendre les plus efficients et les plus opérationnels possible.
S’agissant de la jeunesse, ma feuille de route est aussi très simple. Le discours du Président de la République, « Agir pour la jeunesse », a été prononcé l’an dernier. J’entends simplement jouer en transversalité. Avec Luc Chatel, nous allons mettre en place le service public d’orientation. Avec Nadine Morano, nous allons remettre la jeunesse au centre des politiques familiales. Avec Éric Woerth et Fadela Amara, nous allons mettre en place le service civique et, avec Laurent Wauquiez, les politiques d’insertion et d’emploi pour les jeunes en renforçant l’apprentissage.
Ma feuille de route, monsieur le député, est toute tracée et ma méthode est simple : agir au plus près du terrain en faisant jouer l’esprit collectif du Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
M. le président. Nous avons terminé les questions au Gouvernement.
Suspension et reprise de la séance