DÉCLARATION DE M. LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE
Palais de l’Élysée – Lundi 15 février 2010
Mesdames et Messieurs,
Avec le Premier ministre et les ministres nous avons
rencontré ce matin les partenaires sociaux et je remercie Christine Lagarde,
Xavier Darcos et Laurent Wauquiez d’être à mes côtés.
Nous avons discuté des questions que nous allons avoir à résoudre dans les mois à venir. Nous l’avons fait dans un esprit de responsabilité. Quels que soient nos désaccords, ma conviction c’est que nous devons parler ensemble, comme nous le faisons depuis le début de la crise. Je veux d’ailleurs rendre hommage, une nouvelle fois, à l’esprit de responsabilité dont ont fait preuve les organisations syndicales tout au long de cette période difficile.
Même si la France fait mieux en matière économique que la plupart des autres pays, même si les résultats économiques de la France sont meilleurs que ce qui était prévu, les conséquences de la crise économique vont se prolonger bien après le retour de la croissance.
L’emploi a donc été au centre de nos échanges car il demeure la priorité du Gouvernement et la première source d’angoisse des Français.
Depuis deux ans, beaucoup de mesures ont été prises. Nous
devons maintenant regarder si ces mesures sont toujours adaptées à la
situation, si elles sont efficaces et, le cas échéant, les modifier. Ainsi,
nous avons pris rendez-vous avec les partenaires sociaux pour qu’au mois
d’avril nous procédions à l’évaluation de toutes les mesures prises en faveur
de l’emploi : retirer celles qui ne servent plus, doper celles qui ont besoin
de l’être, prévoir d’autres mécanismes si le besoin s’en faisait sentir.
Laurent Wauquiez conduira cette discussion en accord avec Christine Lagarde.
Nous avons bien sûr abordé le problème des chômeurs qui
arrivent à la fin de leurs droits en matière d’allocations chômage. Nous avons
convenu de la nécessité d’un diagnostic partagé pour savoir quel est le nombre
exact de ces chômeurs en fin de droits et leur situation précise, car
naturellement si l’on n’est pas d’accord sur le diagnostic, il est difficile de
trouver le bon remède.
En tout état de cause, je veux le dire, personne ne sera laissé au bord du chemin. Depuis le début de la crise j’ai voulu que la priorité soit donnée à toutes les mesures permettant d’éviter à ceux qui connaissent des difficultés d’emploi de tomber dans l’exclusion. Cette priorité demeure. On ne peut pas lutter contre l’exclusion par l’assistance uniquement. Il ne s’agit donc pas de créer une allocation d’assistance de plus pour ceux qui arrivent en fin de droits mais en priorité de donner à chacun d’entre eux les moyens qui permettent de retrouver un emploi. C’est par le travail que l’on se réinsère dans la société. Alors cela sera une formation rémunérée pour certains, cela sera une allocation avec une contrepartie en termes d'activité pour les autres, bien entendu sur la base d'un diagnostic partagé.
Après l’emploi nous avons parlé des retraites.
Vous connaissez les impératifs auxquels nous sommes soumis. Tous les chiffres sont sur la table. Compte tenu du temps que les mesures que nous prendrons mettront à produire leur plein effet, si nous voulons sauver notre système de retraites, nous ne pouvons plus différer les décisions. Celles-ci seront donc prises au début de l’automne sur la base d’un texte que le Gouvernement déposera sur le bureau des deux assemblées. J’ai indiqué aux partenaires sociaux qu’en aucun cas je n’accepterai que soit remis en cause le principe de la retraite par répartition, pas plus que je n’accepterai que l’on diminue les pensions des retraités. Je leur ai dit que le moment était venu de décider, même si je souhaite que du temps soit réservé pour le dialogue et pour le débat. Nous allons donc engager la discussion sur la base des travaux que le COR (Conseil d’Orientation des Retraites), organisme au sein duquel les partenaires sociaux sont représentés, doit remettre. Il nous donnera les derniers chiffres sur l’équilibre de nos régimes de retraite. A partir de ce rapport, qui sera publié au début du mois d’avril, Xavier Darcos et Eric Woerth, pour la partie fonction publique, entameront des négociations avec les partenaires sociaux. Ces négociations se dérouleront au mois d’avril, au mois de mai, au mois de juin, au mois de juillet, éventuellement au mois d’août, si cela est nécessaire. Et au début du mois de septembre, les travaux parlementaires s'engageront. Ce qui fait que la question de la pérennité de nos systèmes de retraite sera réglée à l’automne prochain. C’est une question d’intérêt général. Au fond, le débat sur les retraites a commencé en 1993 lorsqu’Edouard Balladur a fait la première réforme, cela fait 17 ans. Ce débat avait même commencé avant.
Je vous rappelle qu’aujourd’hui, il y a une retraite sur dix qui n’est pas financée. Je vous rappelle qu’il y a 20 ans, il y avait deux cotisants, c'est-à-dire deux personnes qui travaillaient, pour financer la pension d’un retraité et qu'à terme malheureusement le rapport sera un retraité pour 1,2 cotisant. Aujourd’hui même, le déficit des régimes de retraite est de l’ordre de 30 milliards d’euros. Il est impossible de ne pas décider et en même temps, il faut faire de la pédagogie, convaincre, comprendre et examiner toutes les possibilités. Il ne faut pas rompre le fil du dialogue parce que cela concerne tout le monde. Voilà donc le calendrier qui a été annoncé. Que nul ne doute que le moment venu, bien sûr, je prendrai mes responsabilités
Le troisième sujet que nous avons abordé était celui de l’industrie. C'est un sujet capital à mes yeux. La France doit rester une terre de production. Je recevrai demain le Comité d’Organisation des Etats Généraux de l’Industrie. Dans le cadre du grand emprunt, 6 milliards et demi d’euros ont été mobilisés pour l’industrie, dont 1 milliard pour tirer les conséquences des états généraux. Un certain nombre de partenaires sociaux nous ont fait des propositions pour orienter davantage l’épargne des Français vers l’industrie et pour conserver cette richesse exceptionnelle, qu’est le savoir-faire de nos ouvriers et des employés de l’industrie. Nous allons travailler dessus. Des propositions sont sur la table et une concertation va s’engager avec les partenaires sociaux pour que l’on trouve les meilleures solutions pour faire que la France reste une terre de production.
Enfin, nous avons évoqué la question de la Fonction publique
La Fonction publique connaît une modernisation sans précédent depuis le début de la Ve République. Je sais que ces changements bousculent des habitudes et donc provoquent des inquiétudes. Mais je veux dire aux fonctionnaires que je sais qu’ils aiment leur métier, qu’ils sont profondément dévoués au service public et qu’ils sont extrêmement compétents. Les réformes que nous engageons vont leur permettre d’avoir de meilleures conditions de travail, une meilleure rémunération et de plus larges perspectives de carrière et de mobilité. Le ministre des Comptes et de la Fonction publique, Eric Woerth réunira les organisations syndicales de la Fonction Publique pour discuter avec elles de tous les problèmes qui les préoccupent et pour préparer dès aujourd’hui l’avenir de nos administrations.
Voilà Mesdames et Messieurs,
L’échange que nous avons eu avec les partenaires sociaux s’est déroulé dans un climat sérieux et responsable. Nous avons pu élaborer une méthode de discussion et un calendrier pour les mois à venir. Les réformes vont continuer parce que la France en a besoin et si la France obtient de meilleurs résultats que les autres, c’est parce que depuis bientôt trois ans, la France se réforme. Ces réformes, je continuerai donc à les mettre en œuvre avec le souci de la justice et le souci du dialogue. D’ailleurs dans ce cadre, parallèlement à la réforme des retraites, nous allons conduire une négociation sur le thème de la pénibilité.
J’ai parfaitement conscience que durant cette année, chacun d’entre nous, quel que soit notre rôle - partenaires sociaux, gouvernement, formations politiques - nous serons face à nos responsabilités. La question des retraites et la question de l’emploi dépassent les termes d’un quinquennat. Ce ne sont pas des affaires de gauche ou de droite, d’opposition ou de majorité, de partenaires sociaux ou de gouvernement, ce sont des questions qui concernent chaque Français pris individuellement. Je sais bien que quand il s’agit de trouver les voies et les remèdes pour préserver un système aujourd’hui gangréné pas les déficits, le consensus est moins facile à obtenir que s'il s’agissait d’imaginer une nouvelle allocation, une nouvelle subvention, une nouvelle dépense. Je ne doute pas qu'alors, nombreux sont ceux qui revendiqueraient la paternité de telle ou telle nouvelle mesure. Mais il y a des rendez-vous que l’on ne peut pas différer. J’ai le devoir de sauver nos régimes de retraite et donc les décisions seront prises dans le courant de cette année.
Mesdames et Messieurs, je vous remercie.