COUR DE CASSATION Audience publique du 15 décembre 2009
Cassation
Mme COLLOMP, président
Arrêt n° 2551 F-D Pourvoi n° G 08-44.222
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par Mme Claude Mazoyer, domiciliée Les Burdines, lieu-dit Glapigny, 74230 Thônes,
contre l'arrêt rendu le 26 juin 2008 par la cour d'appel de Chambéry (chambre sociale), dans le litige l'opposant à la société Sopreda 2, société anonyme, dont le siège est 2-7 route de Nanfray, 74960 Cran-Gevrier,
défenderesse à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 17 novembre 2009, où étaient présents : Mme Collomp, président, M. Lebreuil, conseiller rapporteur, Mme Mazars, conseiller doyen, M. Mansion, conseiller référendaire, M. Carré-Pierrat, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Lebreuil, conseiller, les observations de la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat de Mme Mazoyer, de la SCP Gadiou et Chevallier, avocat de la société Sopreda 2, les conclusions de M. Carré-Pierrat, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 1121-1, L. 1232-1, L. 1234-1 et L. 1234-9 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme Mazoyer, engagée le 12 novembre 1990 par la société Sopreda 2 en qualité de journaliste, exerçait depuis le 1er octobre 1991 les fonctions de rédactrice en chef du titre "Eco des pays de Savoie" ; qu'elle a été licenciée pour faute> <grave> le 17 novembre 2006 ;
Attendu que pour débouter la salariée de toutes ses demandes, l'arrêt retient qu'elle a commis une <faute> <grave> en s'opposant systématiquement et de façon agressive à ses supérieurs hiérarchiques et en adressant le 29 octobre 2006 au directeur de la publication une lettre à caractère <injurieux> ;
Qu'en statuant ainsi, alors que ni la lettre du 29 octobre 2006 par laquelle Mme Mazoyer, sans tenir de <propos> excessifs, <injurieux> ou diffamatoires, rappelait les obligations déontologiques des journalistes, ni le fait pour elle de s'être opposée régulièrement, fut-ce avec vivacité, mais sans abuser de sa liberté d'expression, aux demandes de ses supérieurs, n'étaient constitutifs d'une <faute> <grave> rendant impossible son maintien dans l'entreprise, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 26 juin 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;
Condamne la société Sopreda 2 aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Sopreda 2 à payer à Mme Mazoyer la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze décembre deux mille neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour Mme Mazoyer
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que le <licenciement> de Madame MAZOYER reposait sur une <faute> <grave> et de l'avoir en conséquence déboutée de sa demande d'un montant de 80.000 euros à titre de dommages-intérêts pour <licenciement> sans cause réelle et sérieuse et d'un montant de 2.500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
AUX MOTIFS QUE Claude MAZOYER a été licenciée pour <faute> <grave>, son employeur lui reprochant : une attitude d'opposition systématique, une stratégie délibérée pour se faire licencier, une stratégie de harcèlement, un refus d'obtempérer à une instruction précise donnée lors de la rédaction du 24 octobre, un dénigrement, des affirmations scandaleuses et très gravement <injurieuses>, un retour dans l'entreprise pendant la mise à pied conservatoire et la subtilisation du sommaire rédactionnel prévisionnel du numéro spécial de fin d'année, une agressivité et une malveillance à l'égard de la hiérarchie ; que la <faute> <grave> est définie comme la <faute> qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; que, ainsi que l'a relevé le Conseil de prud'hommes, qu'il existait une mésentente évidente et des divergences de vue entre Alain VEYRET et Claude MAZOYER sur la fonction de rédacteur en chef ; que si un cadre peut manifester son désaccord et émettre des critiques l'égard de sa hiérarchie, encore convient-il que ce salarié n'abuse pas de sa liberté d'expression par des <propos> <injurieux>, diffamatoires ou excessifs ; que les cadre sont notamment du fait de leur statut, tenus d'une obligation de loyauté et de réserve renforcée ; qu'en l'espèce, bien que les différents courriers de Claude MAZOYER ne comportent d'un point de vue strictement rédactionnel aucun terme <injurieux>, le contenu de sa lettre du 29 octobre 2006, adressée à son directeur de publication induisait clairement que celui-ci liait la parution d'articles aux campagne publicitaires commandées par les sociétés, ce qu'il conteste ; que cette allégation présente manifestement un caractère <injurieux> à rencontre d'Alain VEYRET, directeur de la publication, mis en cause par sa subordonnée, pour ne pas respecter les règles de déontologie professionnelle des journalistes, alors que dans le même temps une charte déontologique et éditoriale était en cours d'élaboration et que cette charte comportait des dispositions relatives à l'indépendance des journalistes et de la rédaction ; qu'en outre, il résulte des attestations précises produites aux débats par le société SOPREDA 2 que Claude MAZOYER " ...était souvent opposée à toute suggestion et proposition émanant des services de la société et que cela passai pour un frein au développement. " (attestation LESPINASSE), qu'elle manifestait une opposition systématique à toute recommandation ou demande qui lui était faite par Frédéric BARILLET (cf. attestation de celui-ci) ; que Monsieur LAMET a attesté également avoir été " témoin de fortes oppositions répétées et régulières de la rédactrice en chef du magazine ECO des PA YS de Savoie à l'égard de son directeur de publication (...) et de ses éclats de voix " ; que l'attitude d'opposition de Claude MAZOYER à l'égard de son directeur de publication ou à l'égard de Frédéric BARILLET, ainsi que son attitude d'agressivité à leur encontre est également établie par les attestations précises de Messieurs DELAPLAGNE et MIZERET et de Madame DUFOURNET ; que la circonstance que Claude MAZOYER ne rencontre pas de difficultés professionnelles avec ses subordonnés (cf. notamment les attestations GUILLON/ LEVY-VALENSI) ou qu'elle était considérée par les journalistes comme une bonne rédactrice en chef n'est pas de nature à exclure que son comportement entraînait une ambiance tendue au sein de la rédaction avec son directeur de la publication et le directeur des rédactions ; que, sans même qu'il y ait lieu d'examiner les autres griefs invoqués dans la lettre de <licenciement>, le comportement d'opposition systématique de Claude MAZOYER envers ses supérieurs hiérarchiques et notamment envers Alain VEYRET, directeur de la publication, comportement qui a perduré malgré la notification d'un avertissement le 29 mars précédent et ses allégations <injurieuses> envers Alain VEYRET, constituent une violation <grave> et renouvelée de ses obligations résultant de son contrat de travail rendant impossible le maintien de la salariée dans la société et justifiant son <licenciement> pour <faute> <grave> ; qu'il convient dès lors, par voie de réformation du jugement, de déclarer le <licenciement> justifié et de rejeter les demandes de Claude MAZOYER ; que l'arrêt vaut titre de restitution, de sorte qu'il n'y a pas lieu à condamnation particulière de ce chef.
1°) ALORS sur la lettre du 29 octobre 2006
- QUE l'exercice de la liberté d'expression dans l'entreprise ne saurait justifier un <licenciement>, sauf <abus> ; que ne caractérise pas un <abus> dans l'exercice de la liberté d'expression constitutif d'une <faute> <grave> l'envoi par un journaliste d'un courrier au directeur de la publication ne comportant aucun terme <injurieux> et lui rappelant les prérogatives s'attachant à la qualification de salarié et les règles de la déontologie professionnelle des journalistes ; que, pour dire que les allégations de Madame MAZOYER présentaient un caractère <injurieux> à l'encontre de Monsieur VEYRET, directeur de la publication, la Cour d'appel a relevé que le contenu de la lettre adressé le 29 octobre 2006 à celui-ci par Madame MAZOYER induisait clairement que le directeur de la publication liait la parution d'articles sur les sociétés aux campagnes publicitaires menées par celles-ci, ce que celui-ci contestait; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si de telles allégations étaient justifiées, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L.122-14-3 (devenu L.1232-1), L.122-6 (devenu L.1234-1), L.122-9 (devenu 1234-9) et L.120-2 (devenu L.1121-1) du Code du travail.
-
- en tout état de cause à cet égard QUE l'exercice de la liberté d'expression dans l'entreprise ne justifie un <licenciement> pour <faute> <grave> qu'en cas d'intention de nuire à l'employeur ou de malveillance à son encontre ; que la <faute> <grave> doit dès lors être écartée même lorsque les <propos> tenus à l'encontre de l'employeur sont infondés, dès lors qu'ils sont formulés en des termes modérés exclusifs de toute intention malveillante ; que, pour dire que les allégations de Madame MAZOYER justifiaient un <licenciement> pour <faute> <grave>, la Cour d'appel a relevé que le contenu de la lettre adressé le 29 octobre 2006 à celui-ci par Madame MAZOYER ne comportait aucun terme <injurieux> sur le plan rédactionnel ; qu'en statuant ainsi, par des motifs exclusifs d'une <faute> <grave>, la Cour d'appel a violé les articles L.122-14-3 (devenu L.1232-1), L.122-6 (devenu L.1234-1), L.122-9 (devenu 1234-9) et L.120-2 (devenu L.1121-1) du Code du travail.
- enfin à cet égard QU'il importe peu que la charte déontologique comportât des dispositions relative à l'indépendance des journalistes et de la rédaction, dès lors qu'elle était en cours d'élaboration et non entrée en vigueur ; qu'en s'appuyant sur l'existence de la charte, la Cour d'appel a statué par un motif inopérant, en violation des articles L.122-14-3 (devenu L.1232-1), L.122-6 (devenu L.1234-1), L.122-9 (devenu 1234-9) et L.120-2 (devenu L.1121-1) du Code du travail.
2°) ALORS SUR LA MESENTENTE
- QUE, d'une part, la mésentente ne constitue pas en elle-même une cause de <licenciement>, de sorte qu'elle n'est justifiée que si elle repose sur des faits imputables au salarié ; qu'en relevant qu'il existait une mésentente évidente et des divergences de vue entre Alain VEYRET, directeur de la publication, et Madame MAZOYER, rédacteur en chef, sans rechercher si un tel grief était imputable à Madame MAZOYER, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L.122-14-3 (devenu L.1232-1), L.122-6 (devenu L.1234-1), L.122-9 (devenu 1234-9) et L.120-2 (devenu L.1121-1) du Code du travail.
- QU'en tout cas, en l'absence de <propos> <injurieux>, excessifs ou diffamatoires constitutifs d'une intention de nuire du salarié, le grief de divergence de vue ou de mésentente ne revêt pas un caractère fautif ; que, dès lors, ne caractérise pas une <faute>, a fortiori pas une <faute> <grave>, la mésentente et la divergence du vues entre un journaliste rédacteur en chef d'un journal et ses supérieurs hiérarchiques se traduisant par une opposition à toute recommandation ou demande émanant de celui-ci ; qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel a violé les articles L.122-14-3 (devenu L.1232-1), L.122-6 (devenu L.1234-1), L.122-9 (devenu 1234-9) et L.120-2 (devenu L.1121-1) du Code du travail.
- QUE, d'autre part, la mésentente ne constitue une cause de <licenciement> que si elle repose sur des faits objectifs ; que pour considérer que Madame MAZOYER avait eu un comportement caractérisant une <faute> <grave>, la Cour d'appel a relevé que la mésentente s'était traduite par des éclats de voix à l'encontre de ses supérieurs hiérarchiques et que son attitude d'agressivité envers ses supérieurs hiérarchies étaient établies ; qu'en statuant ainsi, sans rapporter d'élément objectifs, circonstanciés et datés, la Cour d'appel a violé les articles L.122-14-3 (devenu L.1232-1), L.122-6 (devenu L.1234-1), L.122-9 (devenu 1234-9) et L.120-2 (devenu L.1121-1) du Code du travail.
- QU'en tout cas, ne constitue pas une <faute> <grave> la tenue de <propos> agressifs par un salarié envers ses supérieurs hiérarchiques dans un <contexte de mésentente survenant après dix-huit ans de collaboration ; qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel a violé les articles L.122-14-3 (devenu L.1232-1), L.122-6 (devenu L.1234-1), L.122-9 (devenu 1234-9) et L.120-2 (devenu L.1121-1) du Code du travail.
SOC.
PRUD'HOMMES
CB
COUR DE CASSATION
Audience publique du 15 décembre 2009
Cassation
Mme COLLOMP, président
Arrêt n° 2551 F-D
Pourvoi n° G 08-44.222
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par Mme Claude Mazoyer, domiciliée Les Burdines, lieu-dit Glapigny, 74230 Thônes,
contre l'arrêt rendu le 26 juin 2008 par la cour d'appel de Chambéry (chambre sociale), dans le litige l'opposant à la société Sopreda 2, société anonyme, dont le siège est 2-7 route de Nanfray, 74960 Cran-Gevrier,
défenderesse à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 17 novembre 2009, où étaient présents : Mme Collomp, président, M. Lebreuil, conseiller rapporteur, Mme Mazars, conseiller doyen, M. Mansion, conseiller référendaire, M. Carré-Pierrat, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Lebreuil, conseiller, les observations de la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat de Mme Mazoyer, de la SCP Gadiou et Chevallier, avocat de la société Sopreda 2, les conclusions de M. Carré-Pierrat, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 1121-1, L. 1232-1, L. 1234-1 et L. 1234-9 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme Mazoyer, engagée le 12 novembre 1990 par la société Sopreda 2 en qualité de journaliste, exerçait depuis le 1er octobre 1991 les fonctions de rédactrice en chef du titre "Eco des pays de Savoie" ; qu'elle a été licenciée pour faute> <grave> le 17 novembre 2006 ;
Attendu que pour débouter la salariée de toutes ses demandes, l'arrêt retient qu'elle a commis une <faute> <grave> en s'opposant systématiquement et de façon agressive à ses supérieurs hiérarchiques et en adressant le 29 octobre 2006 au directeur de la publication une lettre à caractère <injurieux> ;
Qu'en statuant ainsi, alors que ni la lettre du 29 octobre 2006 par laquelle Mme Mazoyer, sans tenir de <propos> excessifs, <injurieux> ou diffamatoires, rappelait les obligations déontologiques des journalistes, ni le fait pour elle de s'être opposée régulièrement, fut-ce avec vivacité, mais sans abuser de sa liberté d'expression, aux demandes de ses supérieurs, n'étaient constitutifs d'une <faute> <grave> rendant impossible son maintien dans l'entreprise, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 26 juin 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;
Condamne la société Sopreda 2 aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Sopreda 2 à payer à Mme Mazoyer la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze décembre deux mille neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour Mme Mazoyer
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que le <licenciement> de Madame MAZOYER reposait sur une <faute> <grave> et de l'avoir en conséquence déboutée de sa demande d'un montant de 80.000 euros à titre de dommages-intérêts pour <licenciement> sans cause réelle et sérieuse et d'un montant de 2.500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
AUX MOTIFS QUE Claude MAZOYER a été licenciée pour <faute> <grave>, son employeur lui reprochant : une attitude d'opposition systématique, une stratégie délibérée pour se faire licencier, une stratégie de harcèlement, un refus d'obtempérer à une instruction précise donnée lors de la rédaction du 24 octobre, un dénigrement, des affirmations scandaleuses et très gravement <injurieuses>, un retour dans l'entreprise pendant la mise à pied conservatoire et la subtilisation du sommaire rédactionnel prévisionnel du numéro spécial de fin d'année, une agressivité et une malveillance à l'égard de la hiérarchie ; que la <faute> <grave> est définie comme la <faute> qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; que, ainsi que l'a relevé le Conseil de prud'hommes, qu'il existait une mésentente évidente et des divergences de vue entre Alain VEYRET et Claude MAZOYER sur la fonction de rédacteur en chef ; que si un cadre peut manifester son désaccord et émettre des critiques l'égard de sa hiérarchie, encore convient-il que ce salarié n'abuse pas de sa liberté d'expression par des <propos> <injurieux>, diffamatoires ou excessifs ; que les cadre sont notamment du fait de leur statut, tenus d'une obligation de loyauté et de réserve renforcée ; qu'en l'espèce, bien que les différents courriers de Claude MAZOYER ne comportent d'un point de vue strictement rédactionnel aucun terme <injurieux>, le contenu de sa lettre du 29 octobre 2006, adressée à son directeur de publication induisait clairement que celui-ci liait la parution d'articles aux campagne publicitaires commandées par les sociétés, ce qu'il conteste ; que cette allégation présente manifestement un caractère <injurieux> à rencontre d'Alain VEYRET, directeur de la publication, mis en cause par sa subordonnée, pour ne pas respecter les règles de déontologie professionnelle des journalistes, alors que dans le même temps une charte déontologique et éditoriale était en cours d'élaboration et que cette charte comportait des dispositions relatives à l'indépendance des journalistes et de la rédaction ; qu'en outre, il résulte des attestations précises produites aux débats par le société SOPREDA 2 que Claude MAZOYER " ...était souvent opposée à toute suggestion et proposition émanant des services de la société et que cela passai pour un frein au développement. " (attestation LESPINASSE), qu'elle manifestait une opposition systématique à toute recommandation ou demande qui lui était faite par Frédéric BARILLET (cf. attestation de celui-ci) ; que Monsieur LAMET a attesté également avoir été " témoin de fortes oppositions répétées et régulières de la rédactrice en chef du magazine ECO des PA YS de Savoie à l'égard de son directeur de publication (...) et de ses éclats de voix " ; que l'attitude d'opposition de Claude MAZOYER à l'égard de son directeur de publication ou à l'égard de Frédéric BARILLET, ainsi que son attitude d'agressivité à leur encontre est également établie par les attestations précises de Messieurs DELAPLAGNE et MIZERET et de Madame DUFOURNET ; que la circonstance que Claude MAZOYER ne rencontre pas de difficultés professionnelles avec ses subordonnés (cf. notamment les attestations GUILLON/ LEVY-VALENSI) ou qu'elle était considérée par les journalistes comme une bonne rédactrice en chef n'est pas de nature à exclure que son comportement entraînait une ambiance tendue au sein de la rédaction avec son directeur de la publication et le directeur des rédactions ; que, sans même qu'il y ait lieu d'examiner les autres griefs invoqués dans la lettre de <licenciement>, le comportement d'opposition systématique de Claude MAZOYER envers ses supérieurs hiérarchiques et notamment envers Alain VEYRET, directeur de la publication, comportement qui a perduré malgré la notification d'un avertissement le 29 mars précédent et ses allégations <injurieuses> envers Alain VEYRET, constituent une violation <grave> et renouvelée de ses obligations résultant de son contrat de travail rendant impossible le maintien de la salariée dans la société et justifiant son <licenciement> pour <faute> <grave> ; qu'il convient dès lors, par voie de réformation du jugement, de déclarer le <licenciement> justifié et de rejeter les demandes de Claude MAZOYER ; que l'arrêt vaut titre de restitution, de sorte qu'il n'y a pas lieu à condamnation particulière de ce chef.
1°) ALORS sur la lettre du 29 octobre 2006
- QUE l'exercice de la liberté d'expression dans l'entreprise ne saurait justifier un <licenciement>, sauf <abus> ; que ne caractérise pas un <abus> dans l'exercice de la liberté d'expression constitutif d'une <faute> <grave> l'envoi par un journaliste d'un courrier au directeur de la publication ne comportant aucun terme <injurieux> et lui rappelant les prérogatives s'attachant à la qualification de salarié et les règles de la déontologie professionnelle des journalistes ; que, pour dire que les allégations de Madame MAZOYER présentaient un caractère <injurieux> à l'encontre de Monsieur VEYRET, directeur de la publication, la Cour d'appel a relevé que le contenu de la lettre adressé le 29 octobre 2006 à celui-ci par Madame MAZOYER induisait clairement que le directeur de la publication liait la parution d'articles sur les sociétés aux campagnes publicitaires menées par celles-ci, ce que celui-ci contestait; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si de telles allégations étaient justifiées, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L.122-14-3 (devenu L.1232-1), L.122-6 (devenu L.1234-1), L.122-9 (devenu 1234-9) et L.120-2 (devenu L.1121-1) du Code du travail.
-
- en tout état de cause à cet égard QUE l'exercice de la liberté d'expression dans l'entreprise ne justifie un <licenciement> pour <faute> <grave> qu'en cas d'intention de nuire à l'employeur ou de malveillance à son encontre ; que la <faute> <grave> doit dès lors être écartée même lorsque les <propos> tenus à l'encontre de l'employeur sont infondés, dès lors qu'ils sont formulés en des termes modérés exclusifs de toute intention malveillante ; que, pour dire que les allégations de Madame MAZOYER justifiaient un <licenciement> pour <faute> <grave>, la Cour d'appel a relevé que le contenu de la lettre adressé le 29 octobre 2006 à celui-ci par Madame MAZOYER ne comportait aucun terme <injurieux> sur le plan rédactionnel ; qu'en statuant ainsi, par des motifs exclusifs d'une <faute> <grave>, la Cour d'appel a violé les articles L.122-14-3 (devenu L.1232-1), L.122-6 (devenu L.1234-1), L.122-9 (devenu 1234-9) et L.120-2 (devenu L.1121-1) du Code du travail.
- enfin à cet égard QU'il importe peu que la charte déontologique comportât des dispositions relative à l'indépendance des journalistes et de la rédaction, dès lors qu'elle était en cours d'élaboration et non entrée en vigueur ; qu'en s'appuyant sur l'existence de la charte, la Cour d'appel a statué par un motif inopérant, en violation des articles L.122-14-3 (devenu L.1232-1), L.122-6 (devenu L.1234-1), L.122-9 (devenu 1234-9) et L.120-2 (devenu L.1121-1) du Code du travail.
2°) ALORS SUR LA MESENTENTE
- QUE, d'une part, la mésentente ne constitue pas en elle-même une cause de <licenciement>, de sorte qu'elle n'est justifiée que si elle repose sur des faits imputables au salarié ; qu'en relevant qu'il existait une mésentente évidente et des divergences de vue entre Alain VEYRET, directeur de la publication, et Madame MAZOYER, rédacteur en chef, sans rechercher si un tel grief était imputable à Madame MAZOYER, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L.122-14-3 (devenu L.1232-1), L.122-6 (devenu L.1234-1), L.122-9 (devenu 1234-9) et L.120-2 (devenu L.1121-1) du Code du travail.
- QU'en tout cas, en l'absence de <propos> <injurieux>, excessifs ou diffamatoires constitutifs d'une intention de nuire du salarié, le grief de divergence de vue ou de mésentente ne revêt pas un caractère fautif ; que, dès lors, ne caractérise pas une <faute>, a fortiori pas une <faute> <grave>, la mésentente et la divergence du vues entre un journaliste rédacteur en chef d'un journal et ses supérieurs hiérarchiques se traduisant par une opposition à toute recommandation ou demande émanant de celui-ci ; qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel a violé les articles L.122-14-3 (devenu L.1232-1), L.122-6 (devenu L.1234-1), L.122-9 (devenu 1234-9) et L.120-2 (devenu L.1121-1) du Code du travail.
- QUE, d'autre part, la mésentente ne constitue une cause de <licenciement> que si elle repose sur des faits objectifs ; que pour considérer que Madame MAZOYER avait eu un comportement caractérisant une <faute> <grave>, la Cour d'appel a relevé que la mésentente s'était traduite par des éclats de voix à l'encontre de ses supérieurs hiérarchiques et que son attitude d'agressivité envers ses supérieurs hiérarchies étaient établies ; qu'en statuant ainsi, sans rapporter d'élément objectifs, circonstanciés et datés, la Cour d'appel a violé les articles L.122-14-3 (devenu L.1232-1), L.122-6 (devenu L.1234-1), L.122-9 (devenu 1234-9) et L.120-2 (devenu L.1121-1) du Code du travail.
- QU'en tout cas, ne constitue pas une <faute> <grave> la tenue de <propos> agressifs par un salarié envers ses supérieurs hiérarchiques dans un <contexte de mésentente survenant après dix-huit ans de collaboration ; qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel a violé les articles L.122-14-3 (devenu L.1232-1), L.122-6 (devenu L.1234-1), L.122-9 (devenu 1234-9) et L.120-2 (devenu L.1121-1) du Code du travail.