laissons la parole à Eric Raulet , auteur de lumières obscures co-fondateur de ONDES (observatoire d'observation sur les enigmes scientifiques, dissout depuis peu)
des millions de personnes dans le monde pensent avoir entrevu ce qu’il y a après la mort. Pure hallucination ? À voir...
« Je me rappelle avoir crié “Je ne veux pas mourir !”, de toutes mes forces, mais cela ne fut pas entendu. Aussitôt un bruit de fer amplifié me parvint, désagréable. » Le 12 janvier 1961, Solange est en clinique pour donner naissance à son deuxième enfant. Mais l’accouchement prend une tournure inexplicable. « Déjà, je me retrouvais plus vivante que jamais, légère. Je parcourais la salle, regardais, indifférente, mon corps et les médecins qui s’affairaient autour. Les murs s’éloignaient. Tout était plus lumineux. Attirée par une force toute puissante, à une vitesse incomparable, comme aimantée mais sans vertiges, je m’engageais dans un tunnel étroit, sombre ».
Ainsi débute l’un des plus émouvants et des plus complets témoignages d’expérience aux frontières de la mort
Mais redonnons la parole à Solange. Pas très à l’aise, elle se sent avancer, toujours très vite. Un point lumineux apparaît. « J’allais vers lui. Il devenait de plus en plus grand, de plus en plus lumineux ; il m’attirait. Et voilà que la lumière m’apparut comme un gigantesque soleil. J’entendis prononcer mon nom, puis mon grand-père se trouva auprès de moi. Il était radieux. Il me dit : "Viens". Aussitôt une camarade de classe, qui nous avait quittée à dix ans s’approcha. Elle était belle, lumineuse resplendissante d’amour ; elle m’encouragea. Alors, je pénétrais dans cet océan de lumière, et là, il n’y a pas de mot. Je recevais toujours plus d’énergie, toujours plus d’amour, une communion telle, que je devenais lumière, amour, énergie toute puissante. »
La lumière se fait encore plus intense, et elle l’invite à regarder sa vie. Solange ressent une énergie qui se surmultiplie, un bien-être virant au bonheur sans limite. Et puis cette incroyable sensation. « Voilà que je suis dans une compréhension si grande que je deviens le Tout, que je sais Tout, et que de plus, cela est simple, facile à comprendre. Je suis cette Connaissance. Je veux la garder en mémoire ». Moment merveilleux mais fugace. « Je vois qu’elle me quitte, qu’elle m’est ôtée. Je resterai toujours nostalgique de ce savoir ; j’ai su, et je ne sais plus. Je regardais de tous côtés. Je cherchais le temps. Il n’y avait pas de temps dans cette réalité ; le temps n’existait pas. ».
« J’émis un désir, un désir de liberté de mouvement ; alors la lumière pleine d’amour me regarda, me demanda « Veux-tu revenir sur la terre » ? Elle me montra quelques passages de ma vie future ici, et me demanda si cela ne serait pas trop difficile. C’était de grandes épreuves. Remplie d’une telle puissance d’énergie et d’amour, je dis « oui ». C’était un choix. Il y a 43 ans maintenant, que j’ai vécu cette expérience. Elle est toujours aussi présente en moi, et rien ne peut l’effacer ou l’atténuer. »
Un cas exceptionnel, Solange ? Nullement. Depuis les années 70 et la popularisation des EFM par le médecin américain Raymond Moody, des témoignages ont été rapportés sous toutes les latitudes et dans les circonstances les plus variées : accouchement, arrêt cardiaque, électrocution, hémorragie cérébrale, noyade, asphyxie, complications lors d’une opération chirurgicale, tentative de suicide, etc.
Aux Etats-Unis, 30 % des personnes réanimées ont partagé cette expérience, affirmaient les premiers chercheurs américains dont le cardiologue Michael Sabom. Dans ce même pays, un sondage en 1988 estimait le nombre de témoins d’EFM à 8 millions. En 2001, une étude médicale menée aux Pays-Bas a ramené la fréquence de ces expériences à 12 %. Sans doute ces données sont-elles encore sous-estimées. En effet, nombres de témoins choisissent de taire leur expérience, incapables de traduire son contenu et l’émotion qu’elle a fait naître. Certains s’essayent à en parler autour d’eux, généralement à l’hôpital. Devant l’accueil sceptique du personnel et de leurs proches, ils restent silencieux. En moyenne, les témoins d’EFM mettent cinq à dix ans pour exprimer une première fois leur vécu. Certains n’en diront jamais un mot.
Qu’ont donc expérimenté ces « millions » de personnes ? Une incursion dans l’Au-delà ? Telle était la conviction de Raymond Moody, désormais partagée par une majorité de ceux qui l’ont vécu.
Curieusement, pourtant, l’Église catholique regarde avec défiance ce phénomène qu’elle n’a jamais cherché à utiliser comme l’attestation d’une vie après la mort. Par ailleurs, médecins et scientifiques s’interdisent d’y voir une manifestation surnaturelle. Et c’est bien normal car la science, avec les critères de vérité qui lui sont propres, n’est pas « outillée » pour s’attaquer à la question de l’Au-delà.
Cela n’a pas empêché les études scientifiques de se succéder, à mesure que les témoignages d’EFM se faisaient eux-mêmes plus nombreux grâce aux progrès des techniques de réanimation. Hélas, il n’est pas facile de les comparer car elles ne définissent pas toutes, de façon identique, ce qu’est une EFM. Néanmoins, quelle que soit l’éducation, la culture, l’origine sociale ou l’âge des témoins (les enfants aussi vivent des EFM), les expériences sont décrites suivant un certain nombre d’étapes. Cinq d’entre elles, toutes présentes dans le récit de Solange, reviennent fréquemment mais rarement ensembles : la sortie hors du corps, l’aspiration dans un tunnel, l’immersion dans une lumière où a lieu la rencontre d’êtres connus ou non , et enfin le retour douloureux dans le corps (voir l’ensemble des photos de cet article).
Pour l’écrasante majorité des médecins et spécialistes, pas de doutes : l’explication est à rechercher du côté du cerveau. Lorsqu’il est confronté à la perspective de sa propre fin, notre noble organe se mettrait à dysfonctionner, engendrant une batterie d’hallucinations. En 2002, la découverte d’un neurologue de l’hôpital de Genève a conforté cette hypothèse. En diffusant par hasard un faible courant électrique dans le cortex temporal d’une patiente atteinte d’épilepsie , le Dr Olaf Blanke a fait naître chez cette personne des sensations de sortie du corps ; elle se voyait comme flottant deux mètres au-dessus d’elle-même.
Avant lui, le psychiatre Karl Jansen, de l’hôpital Maudsley de Londres, avait constaté que des injections intraveineuses de kétamine -un médicament classé comme stupéfiant- permettait de provoquer artificiellement les étapes d’une EFM. Or la kétamine modifie le fonctionnement « normal » de certains neurones et active à leur surface des récepteurs, dits récepteurs NMDA, susceptibles de faire halluciner. Toutefois, écrit Jansen, cette hypothèse n’a pas la prétention de valoir pour toutes les EFM et elle n’est pas incompatible avec d’autres théories.
En fait, les spécialistes des neurosciences reconnaissent qu’ils ne savent pas expliquer les EFM dans le détail... mais que c’est le cas de beaucoup de phénomènes liés au cerveau ! Néanmoins, dans cette tâche, il leur faudra prendre en considération de troublants constats enregistrés par certains de leurs collègues.
En 2001, le cardiologue néerlandais Pim Van Lommel a publié une enquête retentissante dans The Lancet, l’une des plus grandes revues médicales au monde. Après dix ans d’enquête dans dix hôpitaux néerlandais sur 355 personnes en état de mort clinique -ni respiration ni pouls-, il constate que les témoignages d’EFM sont rares (12 %). Et que cette rareté pose problème : pourquoi, s’il s’agit de la réaction « normale » d’un cerveau menacé, n’y a-t-il pas plus de patients à en témoigner ?
Dans le cours de son étude, il tombe sur des récits incompréhensibles. Comme celui de cet homme de 44 ans, inerte, en état de mort clinique, dont la réanimation commence dans une ambulance. Pour lui glisser un tube respiratoire dans la gorge, une infirmière lui retire son dentier. Après une heure et demi d’efforts, le malade revient à la vie. Une semaine plus tard, l’infirmière le visite et... surprise ! Le voilà qui la reconnaît, lui réclame son dentier, décrit avec précision l’intérieur de l’ambulance, puis la petite salle de réanimation. Comme s’il s’était vu de dessus pendant tout ce temps où il était inconscient !
Autre cas, plus troublant encore, rapporté par Michael Sabom : une jeune Américaine opérée du cerveau et dont l’électro-encéphalogramme devient soudainement plat, ce qui traduit une totale absence d’activité électrique du cerveau. Et pourtant, ranimée, elle racontera avoir vécu une intense EFM alors que c’est théoriquement impossible avec un cerveau HS !
On ne s’étonnera donc pas que Pim Van Lommel écrive dans ses conclusions : « L’idée, soutenue jusqu’à présent mais jamais démontrée, que la conscience et la mémoire sont situées dans le cerveau doit être discutée ». En clair, si notre esprit a besoin de notre cerveau pour exister, il ne se réduit pas à cela -ce qu’il serait bien hâtif d’interpréter comme le signe de l’existence de l’âme.
Il n’est pas le seul à défendre cette position : en 2001, Sam Parnia, médecin à l’hôpital général de Southampton (Angleterre) publie, en association avec son collègue Peter Fenwick, une étude sur les EFM aux Royaume-Uni. Et lui aussi de constater : « Certains patients semblent avoir obtenu des informations durant leur période d’inconscience. Dans ce cas, cela suggérerait qu’une partie de la conscience humaine soit capable de se séparer du corps et d’obtenir des informations à distance. » Une idée assez décapante... mais que Parnia manie avec des pincettes : « Il n’est pas exclu que les informations rapportées aient pu être obtenues par le biais de sources sensorielles tout à fait ordinaires ».
En 1997, une enquête dirigée par Kenneth Ring, professeur de psychologie à l’Université du Connecticut (Etats-Unis) a rendu un peu plus brumeuse la question des EFM. Elle a été conduite auprès de personnes aveugles, parmi lesquelles plusieurs aveugles de naissance, ayant subi une réanimation. Certains d’entre elles affirment avoir vécu une EFM et se remémorent leur sortie hors du corps ainsi que la « vision » de leur réanimation avec de nombreux détails. Comment un aveugle peut-il affirmer avoir vu ? En fait, les choses ne sont pas si simples, comme l’exprime l’un des sujets : « Ce n’était pas visuel. C’était presque comme quelque chose de tactile, sauf qu’il était évidemment tout à fait impossible que je puisse toucher quoi que ce soit depuis là-haut. Je percevais tout cela dans mon esprit ». Et Kenneth Ring de postuler que ces aveugles, comme toute personne vivant une EFM, ont vécu un mystérieux état de conscience, le mindsight -littéralement, « vue de l’esprit »-, qui leur a permis de voir le monde tout à fait différemment.
Mais la palme de la découverte la plus troublante réside dans le fait que ces expériences peuvent être vécues sans proximité avec la mort, à l’occasion par exemple d’un état de relaxation (repos, communion avec la nature, yoga, etc.) Les « EFM » ne seraient alors plus des EFM... à un « détail » près : seuls ceux qui ont frôlé la mort voient leur existence bouleversée. En effet, au fil des années, leurs valeurs vont alors vers l’altruisme, l’aide à autrui. La mort n’est plus du tout redoutée. Et la vie est considérée comme une valeur sacrée à laquelle il ne faut pas mettre un terme, même si beaucoup aspirent à retrouver cette « dimension » dans laquelle ils furent plongés un bref instant. Ce sentiment est partagé par les personnes ayant vécu une EFM après une tentative de suicide ; dans leur majorité, elles ne récidivent pas.
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